La fin E, donc. C'est tellement riche que je pense que ça mériterait un gros post-mortem et un article qui retrace sa conception (j'ai lu l'entretien avec Taro que Nicolas avait tweeté à ce sujet, avec des infos intéressantes). C'est à la fois attendu et renversant, mais oui, c'est très malin. Le discours est simple comme bonjour, comme dans le reste du jeu, mais l'application est ludique et émouvante. Je ne veux pas trop faire une énième théorie foireuse sur le sujet, mais c'est peut-être ça, au fond, la grande différence entre jeux occidentaux et jeux japonais : même dans ses penchants les plus cinématographiques et littéraires, ce dernier ne sacrifie pas l'esprit de
jeu vidéo.
On peut prendre comme exemple
The Witcher (encore lui, désolé), très travaillé sur le plan du récit et qui finit par ne plus rien proposer à jouer tant il doit porter la lourdeur de sa cohérence narrative.
Nier est foutraque, souvent mal branlé, parfaitement incohérent, et aussi généreux sur le plan ludique, sans cesse surprenant, en un mot joueur. Ca ne l'empêche pas de délivrer son message et de frapper juste. Il a sa personnalité propre mais je le classe dans la même famille que les MGS, j'ai pas arrêté de penser à MGS tout du long. Et d'ailleurs je pense que Zure devrait essayer d'y jouer, tout en essayant de fermer les yeux sur ses raideurs des premières heures (difficilement oubliables cela dit, mais finalement pardonnées).
Il faut aussi arrêter de parler de "finir X fois le jeu". C'est pas du tout ça et je pense que c'est perçu de façon décourageante. Ce ne sont même pas des runs, c'est plutôt des épisodes successifs. Je ne sais pas si c'était la même chose dans le premier Nier.
Donc oui, c'est un jeu très imparfait, assez mal rythmé (l'open world, qui au final n'en est pas un, je ne suis toujours pas convaincu et je n'ai fait que la moitié des quêtes secondaires tant elles me paraissaient sans intérêt - à part celles des caisses à pousser, étrangement). La touche Platinum apporte un certain dynamisme, mais sans jamais transcender les choses ; le combat est efficace. En revanche, j'adore le hacking (je trouve les combats avec 9S plus intéressants du coup, même si ça permet de craquer les ennemis facilement), et puis le hacking est à plusieurs reprises un vrai moteur narratif. Spectacle et jeu, toujours mêlés, comme je disais plus haut...
Bon, les systèmes sont parfois chelous : gros fail des chips - faute de réussir à lire correctement le menu, j'ai laissé le jeu paramétrer en automatique presque toujours et je n'ai eu aucun souci. La carte est dégueulasse, je crois qu'ils voulaient favoriser l'exploration intuitive en fait. Le loot ne sert à rien. Les bonnes idées sont parfois les plus longues (la fin E, par exemple, est géniale mais un peu comme ça).
Et puis d'un autre côté... mince, il y a les robots, les scènes épiques, les rebondissements, les changements de registre et de genre, il y a Pascal (d'ailleurs doublé par la voix de Morgana dans P5 <3), il y a l'amour, des blagues dignes des droïdes comiques des "Métabarons" de Jodorowsky, beaucoup de mélancolie, de la tristesse au carré, de la jubilation narrative à voir les morceaux épars se rassembler, des références à Evangelion, un choeur antique, des attractions, des retours en arrière et des avance-rapides fulgurantes, des duels au sabre, des séquences à fond la caisse, des histoires de corps reconstruits, des changements de corps, des héroïnes, des sacrifices, beaucoup de méta qui marche d'ailleurs très bien, des feux d'artifices, des textes mal écrits contrebalancés par des répliques fabuleuses, il y a un jeu constant entre l'histoire et le joueur et à la fin...
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évidemment j'ai tout effacé, tu pensais quoi ?